Notebooks III · Studio Ongarato x Imprimerie du Marais

Entretien

Imprimerie du Marais (IDM) : Qu’est-ce qui a motivé votre envie de participer à cette troisième édition de Notebooks, à l’invitation de l’Imprimerie du Marais et Made Thought ?

Studio Ongarato (SO) : Nous sommes heureux d’avoir été invités à participer à ce projet d’envergure internationale. Nous avons un grand respect pour le travail de Made Thought et c'était une merveilleuse occasion d'explorer le potentiel de l'imprimé aux côtés de l'Imprimerie du Marais. Ces deux maisons partagent des valeurs communes aux nôtres, en particulier le goût de l'artisanat et de l'expérience tactile.

IDM : Qu’est-ce qui vous a plu dans le fait de devoir proposer une interprétation graphique de votre pays, au sens large et complexe du terme ?

SO : L'identité de notre nation est complexe et en constante évolution, ce qui rend ambitieuse la tâche d’en produire une interprétation visuelle. 

Nous avions joint un texte à notre contribution : « Bien que l'Australie abrite l'une des plus anciennes cultures indigènes de la planète, la trace de ses ancêtres remonte jusqu’en Asie du Sud-Est. L'île-continent abrite de nombreuses cultures, ethnies et nationalités, brassées au fil du temps. Ainsi, l’essence métissée de la culture australienne reflète aussi bien l’histoire fondatrice que l'identité future de cette nation ».

Plutôt que de représenter l'Australie au moyen de stéréotypes qui la caractérisent habituellement, nous avons fait le choix de considérer ses données démographiques comme des formes objectives de narration. Ainsi, nous avons cartographié le visage changeant du pays à travers l’histoire de son immigration, d’aussi loin que l'on puisse remonter dans le temps. À partir de la trame du graphique chronologique, nous avons procédé au tissage de différents types d’informations entre elles, sur des axes opposés. Il en résulte une véritable tapisserie qui figure ce « melting pot ». La mosaïque que constitue l’identité australienne est ici retranscrite avec force en une combinaison complexe de différentes techniques d'impression qui interagissent et se superposent.

IDM : Aviez-vous déjà designé des carnets de note avant de signer celui qui compose cette troisième édition ? De quelle manière avez-vous approché ce format ici ?

SO : Les précédents projets de cahiers de note sur lesquels nous avons pu travailler étaient plus sobres en termes d'expression et d’impression, se résumant à une représentation de la marque et au respect du cahier des charges du client. La carte blanche accordée dans le cadre de la création de cette collection de notebooks était bien plus ouverte. Cela nous a permis d’explorer la veine expressive, expérimentale et ludique de nos designs.

IDM : Comment avez-vous envisagé de travailler le déployé proposé par la couverture construite en leporello en lien avec les pages intérieures ?

SO : Ce format de couverture en accordéon nous a permis d'élargir notre concept en offrant à la séquence chronologique la possibilité de s'étendre plus longuement. En cela, nous nous sommes beaucoup inspirés d’utilisations emblématiques de ce type de façonnage, à l’instar du vaste paysage de rue déployé par Ed Ruscha dans son livre Every Building on Sunset Strip.

IDM : Quelles étaient vos envies/ambitions, à la fois conceptuelles et techniques ? Faisaient-elles écho à des travaux déjà réalisés ou en cours, ou bien ont-elles généré une toute nouvelle exploration ?

SO : Nous souhaitions intégrer avec fidélité et précision un ensemble de données strictes au design à travers les techniques d’impression qui s’offraient à nous. Par ailleurs, il nous semblait important de travailler l’association de différentes techniques afin de faire poétiquement écho à la diversité de l’identité australienne. En cela, la combinaison de la dorure microstructure et du gaufrage nous est apparue comme une évidence. 

IDM : Aviez-vous également des craintes ?

SO : La complexité du design et des techniques a nécessité le repérage minutieux de nombreux éléments, ce qui constitue habituellement un défi en matière d’impression. Nous pouvions donc avoir quelques appréhensions en termes de rendu ; appréhensions qui ont vite été dissipées au fil de la collaboration avec les équipes expérimentées de l’Imprimerie du Marais.

IDM : Aujourd’hui, alors que vous avez enfin un exemplaire dans les mains et 8 années de recul, que pensez-vous du carnet réalisé par vos soins ? Si vous deviez répondre à la même invitation ce jour, votre proposition serait-elle différente ?

SO : Le design de la couverture représente déjà, en soi, une capsule temporelle. Il est donc le reflet d'une période donnée. Développer le même concept aujourd'hui nous conduirait sans aucun doute à une interprétation visuelle légèrement différente – en lien avec notre appréhension actuelle de l'Australie contemporaine –, tout en conservant intact son intérêt.

IDM : Que pensez-vous des projets réalisés par les autres ; certains vous ont-ils particulièrement marqués/fait voyager ; dans quel sens ?

SO : La proposition de Kazunari Hattori autour du feu et de l'eau est à la fois élégante et tactile. Elle cristallise avec poésie le caractère contrasté mais nuancé du Japon. Le message environnemental de Page Tsou, exprimé avec grâce et sensibilité, ouvre cette collection de carnets à des préoccupations désormais omniprésentes, qui touchent tous les citoyens du monde. Chacune des 8 propositions rassemblées au sein de cette collection est une contribution unique qui participe à la création d’un ensemble distinctif.

IDM : Que vous évoque la notion de voyage spatio-temporel retenue pour présenter cette nouvelle collection ? Vous invite-t-elle à poser un nouveau regard sur le travail effectué ? Entre vision rétrospective et prospective, quels seraient les nouveaux possibles que vous aimeriez défricher ?

SO : Nous nous plaisons à penser que tout ce que nous créons s’attache à être pérenne, aussi bien dans le fond que dans la forme. Cela ne nous empêche pas, bien au contraire, d’être animés par la volonté d’innover. Dans cette optique, nous sommes toujours heureux de poursuivre des collaborations à travers le monde, à la découverte, entre autres, de nouveaux médias.

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« Plutôt que de représenter l'Australie au moyen de stéréotypes qui la caractérisent habituellement, nous avons fait le choix de considérer ses données démographiques comme des formes objectives de narration. »

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« La mosaïque que constitue l’identité australienne est ici retranscrite avec force en une combinaison complexe de différentes techniques d'impression qui interagissent et se superposent. »

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« La carte blanche accordée dans le cadre de la création de cette collection de notebooks était bien très ouverte. Cela nous a permis d’explorer la veine expressive, expérimentale et ludique de nos designs. »

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« La proposition de Kazunari Hattori autour du feu et de l'eau est à la fois élégante et tactile. Elle cristallise avec poésie le caractère contrasté mais nuancé du Japon. »

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